Papillon?
Nous étions tous les deux dans sa voiture. Ensemble, nous allions rendre visite à mon père hospitalisé. Avec lui, les discussions sont souvent profondes. La pluie et le beau temps ne nous intéressent pas vraiment... Ainsi, nous roulions, angoissés de rencontrer un homme malade, mon père, son frère. Comment allait-il être en cette fin de journée? Certainement fatigué, stressé par les multiples examens, effrayé par le futur diagnostique. Pour rompre l'ambiance tendue qui régnait dans la voiture, il me demanda alors comment allait mon petit coeur. Etait-il entiché d'un nouvel homme? Ma réponse fut brève. Non. Aucune vague sentimentale à l'horizon, le calme plat d'un coeur autrefois meutri. De sa voix chaude et posée, mon oncle m'expliqua qu'il ne fallait pas espérer tout de suite une relation stable et idéale. Qu'il fallait au contraire que je papillonne de fleur en fleur sans attendre quoi que ce soit et que là, inévitablement je trouverai La fleur, Ma fleur. L'unique, la vraie. Mais comment pourrais-je butiner autant de rosiers moi qui n'ait connu dans mon existence que deux hommes? Malgré mon âge, j'appréhende toujours la rencontre avec L'Autre, avec celui qui pourrait me faire croire que la vie est belle et qui finalement me prouverait qu'il n'en est rien. Mon pessimisme me freine, mes complexes m'emprisonnent, la peur de l'échec me tétanise... Je ne peux être un papillon avide de testostérone quand depuis toujours je me déguise en chenille se cachant dans son cocon...